La nomination de Thani Mohamed, ancien sénateur Mahorais et fervent défenseur de l’attachement de Mayotte à la France au poste du secrétaire d’Etat chargé des partenariats internationaux n’est pas passée inaperçue sur le paysage politique national. Dr Zilé Soilihi, politicien comorien perçoit cette nomination comme un mépris de la France vis-à-vis des Comores sur son droit et sa souveraineté de l’île de Mayotte.
Thani Mohamed, ancien sénateur et fervent défenseur de l’attachement de Mayotte à la France est nommé secrétaire d’État chargé des partenariats internationaux dans le nouveau gouvernement de Macron. Pour les Mahorais, il s’agit d’une réponse politique extrêmement puissante. Entant que politicien comorien, comment expliquez-vous cette nomination ?
Il s’agit là au mieux d’une provocation, sinon d’une insulte au peuple comorien qui, désormais verra un ennemi de l’unité de notre pays prendre les rênes de la politique d’outre-mer de la France. Quelle considération Macron se fait-il de notre souhait légitime d’exiger que la France se conforme aux nombreuses résolutions des Nations unies qui consacrent le caractère comorien indiscutable de l’île de Mayotte. En nommant à cette fonction stratégique un fervent défenseur de l’appartenance de Mayotte à la France Macron donne une gifle à Azali qui avec son ex-ministre des affaires étrangères Amine Souef, a vendu contre quelques millions d’euros la souveraineté de notre pays. Macron a bien compris que la voie est ouverte pour lui permettre d’humilier un état qui va jusqu’à vendre sa dignité. La nomination de Thani Mohamed relève aussi d’un calcul visant à donner des gages aux mahorais qui votent pour le rassemblement national et à rapprocher par cette voie ces électeurs à la macronie aujourd’hui en désarroi et qui essaie de se reconstruire après le cuisant échec des législatives. Un gouvernement comorien digne aurait dénoncé cette nomination en faisant savoir à la France et au monde son caractère dangereux pour une solution au problème de Mayotte. Bien au contraire, nous constatons un silence coupable des autorités de fait de l’Union des Comores. Nous sommes devenus un Etat vassal sous la coupe d’un autre Etat qui peut impunément faire ce qu’il veut de l’avenir de notre patrie. Le peuple comorien doit prendre la mesure de ce danger et de se mettre en mouvement pour enfin se débarrasser d’une dictature aux ordres.
Les négociations menées entre les autorités Mauriciennes et du Royaume-Uni ont abouti à la victoire du droit international qui consacre définitivement la souveraineté de l’Etat Mauricien sur les Chagos, que diriez-vous pour le cas des Comores sur l’île de Mayotte face à la France ?
L’île Maurice est un pays respecté sur la scène internationale qui a une capacité de lobbying sans comparaison aucune avec celle, inexistante de l’Union des Comores. Il n’y a pas sur les îles Chagos une population manipulée par des politiciens qui demandent leur rattachement au Royaume-Uni. La capacité de lobbying de l’île Maurice est renforcée par le pont ethnique des Indiens qui détiennent des postes clés et décisionnaires dans ce même royaume uni dont les convoitises et la stratégie d’influence dans l’océan Indien sont différentes de celles de la France qui veut pérenniser sa domination coloniale sur notre pauvre pays écrasé de multiples souffrances avec un œil rivé sur les ressources récemment mises à jour au large des Comores. Maurice a donc la chance d’avoir à sa tête des autorités intègres sans tâches, disposant d’un puissant réseau international capable d’agir et de pousser les bons pions pour faire valoir ses droits. Tel n’est pas le cas des Comores harnachées d’une diplomatie moribonde, inaudible, peu crédible et d’un président détesté par son peuple et rejeté par les Etats du Sahel. Maurice et les Comores ne jouent pas dans la même cour. l’un est un pays réellement émergent doté d’une bonne gouvernance , d’un excellent climat des affaires , l’autre un pays qui vend des rêves d’émergence dans un état sans eau ,sans électricité, gangrené par la corruption et la mauvaise gouvernance ! Ironie du sort, nos dirigeants vont se faire soigner à Maurice et non l’inverse.
Le Moyen-Orient est à feu et à sang actuellement, certains pays arabes comme le Qatar commence à hausser le ton pendant que la diplomatie comorienne est en silence face aux atrocités commises contre le peuple Palestinien et Libanais. Comment expliquez-vous ce silence ?
La diplomatie comorienne n’existe pas. Notre crédibilité est largement abîmée sur la scène internationale ! Après un ancien ministre des affaires étrangères, auteur de fraudes auprès de la caisse d’allocations familiales françaises, touchant à tort le RSA, nous héritons d’un jeune homme sympathique au demeurant mais novice , ignorant des enjeux mondiaux ,portant un costume trop large pour ses faibles compétences , qui a montré ses limites et son manque d’expérience aux nations unies. Notre voix, nos prises de position importent peu. La scène internationale se fiche comme d’une guigne des gesticulations ou opinions d’un président qui fut le seul président de l’Union Africaine à être persona non grata dans des pays africains. A côté du silence condamnable des autorités comoriennes qui auraient pu au moins émettre un communiqué de condamnation du massacre du peuple palestinien et celui en cours du peuple libanais, ou bien comme cela est l’usage dans les pays musulmans d’organiser des prières collectives pour la sauvegarde d’un peuple martyr, je souhaite louer les manifestations des comoriens de l’étranger qui se font l’écho de la colère des palestiniens. Mon vœu le plus cher est que le peuple de l’intérieur fasse de même et montre par tout moyen approprié sa solidarité avec les enfants qui meurent sous les bombes aveugles d’Israël.
Quelques jours après le 79ème sommet des Nations Unies, le nouveau secrétaire général du gouvernement a reçu l’ambassadeur de France et M. Bigot, député de l’extrême droite, pourquoi cette réception, selon vous ?
Bigot se souhaite approfondir la position des Comores sur Mayotte qui est un réservoir de voix pour le rassemblement national. Il veut comprendre jusqu’à quel point les Comores tiennent à Mayotte et imaginer un scénario où il peut contribuer à résoudre ce qu’il considère comme étant une immigration illégale. Il veut être force de proposition pour que les Comores baissent définitivement la garde sur son intégrité territoriale. Il n’aura pas grand mal pour atteindre ce but. Il lui suffira de rassurer à Azali que le rassemblement national dont la prise de pouvoir aux prochaines présidentielles et à de possibles élections législatives anticipées est plus que probable continuera à donner de l’argent au dictateur pour que celui-ci continue à ignorer sa dignité et ce faisant celle du peuple comorien. Ce rendez- vous a été à mon avis facilité par l’ambassadeur de France à la demande d’un parti devenu central dans l’échiquier politique français. Celui qui reçoit Bigot c’est Azali car son secrétaire général est simplement « Papa m’a dit » et n’a aucune marge de manœuvre en dehors de la volonté du père. Celui-ci aurait pu ne pas accepter d’honorer ce rendez- vous. Mais en recevant ce député, il donne encore une fois le signal de son désintérêt pour la question de Mayotte. Il préfère construire de nouvelles relations avec un parti fasciste pour que ce dernier s’il devait demain arriver au pouvoir continue à le maintenir à Beit Salam. En résumé Azali Assoumani sent le bouleversement des équilibres politiques en France et veut construire l’édifice qui lui permettra d’éviter toute position négative de la France à son égard dans un avenir où ses anciens alliés français risquent de perdre de leur poids et de leur influence.
Me Larifou se rend à Mayotte pour demander la préfecture de bien accueillir les militaires déserteurs au sujet de l’exécution présumé du jeune militaire Fanou, n’est-il pas une reconnaissance de facto de l’attachement de Mayotte à la France ?
Non ! Il faut lire l’action de maître Larifou selon une approche systémique. Cet avocat défend et assiste les comoriens dans plusieurs pays. Dans son approche, il privilégie la défense du comorien en danger au-delà de toute autre considération. Si des militaires fuyant comme d’autres, la dictature se réfugient à Mayotte, il est honorable de sa part de chercher les voies et moyens pour assurer leur sécurité. Il ne souhaite pas revivre l’affaire Bobocha qui a été livré en dépit des règles internationales ayant trait au droit d’asile par le gouvernement malgache à la dictature d’Azali. Il se bat pour que cela ne se reproduise pas. Je salue ce courage et l’énergie qu’il déploie dans le monde entier pour porter secours à tout comorien en péril. J’aurais souhaité que l’opposition lui emboîte le pas, oublie les rancœurs et les divisions pour agir avec maitre Larifou pour la défense du droit des comoriens à vivre le droit tout le droit et rien que le droit.
Propos recueillis par Kamal Saïd Abdou